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Embargo sur les armes en Syrie. Une proposition britannique

(BRUXELLES2) François Hollande et David Cameron sont repartis ensemble - en Thalys - du Sommet européen avec comme objectif  - ainsi que l'a détaillé le président français à la presse - « de discuter de politique étrangère. Nous avons des positions, des démarches communes ». Et de citer particulièrement la Syrie. « Nous faisons tout pour que la conférence de Genève puisse non seulement se tenir mais aussi aboutir ». François Hollande a refusé d'anticiper le résultat des négociations entre les ministres des Affaires étrangères, lundi (27 mai). Mais répété fermement la position française. « Nous faisons, en sorte, de dire aux Européens que la pression doit continuer. On ne peut pas avoir un régime qui a des armes d’un côté et une opposition désarmée de l'autre côté. »

Un sujet abordé au sommet européen (mais non discuté)

La levée de l'embargo sur les armes - ou plutôt sa modification - a été abordée, de façon rapide, à la fin d'un Sommet européen, très court (4 heures) et qui était consacré à d'autres sujets (énergie, fraude fiscale). David Cameron a ainsi plaidé non pas pour la levée de l'embargo sur les armes mais son aménagement afin de mettre « davantage de pression sur le régime Assad pour venir à la table des négociations ». Pour les Britanniques, il faut « envisager toutes les options, y compris la possibilité de donner une aide supplémentaire à l'opposition syrienne modérée ». Cette position a été soutenue - selon nos informations - par le président français, Fr Hollande, et le Premier ministre italien, Enrico Letta. Mais plusieurs pays ont indiqué leur hostilité à toute levée. Le chancelier autrichien Fayman a notamment indique que « si l'Europe lève l'embargo, l'Autriche retire ses casques bleus du plateau de Golan » (des casques bleus autrichiens avaient été blessés en novembre 2012. Lire : 2 soldats autrichiens de l’ONU blessés en Syrie. D'autres - de nationalités différentes - brièvement enlevés plus récemment).

Une proposition d'amendements

Peu avant, lors des réunions des ambassadeurs (COPS, COREPER) les Britanniques avaient déposé un papier d'option qui aboutit, de façon technique, non pas à lever l'embargo mais à en modifier la teneur en permettant la livraison d'armes à « l'opposition modérée » et non « aux extrémistes ». L'objectif est, comme l'indiquent les Britanniques, « d'éviter toute dépendance de l'opposition syrienne modérée par rapport aux groupes armés islamistes bien armés ».

Actuellement, les États membres peuvent fournir la Coalition nationale Syrienne (CNS) une « assistance technique et du matériel non létal destiné à la protection des civils ». Deux propositions alternatives sont faites : l'une vise à exempter totalement la CNS de l'embargo sur les armes en permettant la livraison sans autre condition (la condition de "destination à la protection des civils" serait ainsi supprimée), la seconde à permettre la fourniture de matériel léthal mais en gardant cet objectif de "protection des civils"

1ère alternative. Exempter totalement la Coalition nationale de l'embargo sur les armes

Cette option permettrait que l'embargo ne s'applique plus à la Coalition nationale pour la révolution syrienne et les forces d'opposition. Comme l'explique un diplomate britannique, la raison de cette évolution est logique. D'une part, « l'embargo sur la Syrie a été créé afin d'empêcher le régime d'Assad de brutaliser son propre peuple. L'embargo ne devrait (donc) pas s'appliquer à la Coalition nationale, qui n'a pas été responsable de la violence systématique et oppressive contre des civils perpétrées par le régime. » D'autre part, « cette approche est cohérente avec l'approche des États membres ont adopté pour les sanctions financières et commerciales ».

Amendement • the provision of technical assistance, brokering services and other services for the sale, supply, transfer  or export of arms and related materiel of all types or equipment which might be used for internal repression to the Syrian National Coalition for Opposition and Revolutionary Forces intended for the protection of civilians;

2. Permettre la fourniture de matériel létal à la CNS et aux forces d'opposition

De façon concrète, il suffirait de retirer le mot "non-létal" de la formulation actuelle du paragraphe sur l'embargo sur les armes. Cela permettrait de fournir du matériel létal « sans autres modifications ». Cet équipement létal devrait toujours respecter l'objectif « destiné à la protection des civils». Pour les auteurs de la proposition, cette option aurait un avantage : « permettre à l'UE d'envoyer un message clair à Assad que toutes les options sont sur la table. Ce qui augmente la pression sur lui pour venir à la table des négociations. Il permet également aux membres de l'UE de bénéficier de davantage de souplesse pour fournir une plus grande gamme d'équipements pour la Coalition nationale syrienne afin qu'elle puisse protéger les civils, y compris lors de circonstances extrêmes ou inattendues. »

Amendement •  “Article 1 (embargo) shall not apply to (...) the sale, supply, transfer or export of non-lethal military equipment or of equipment which might be used for internal repression, intended for humanitarian or protective use or for the protection of civilians, or for institution building programmes of the United Nations (UN) and the European Union, or for European Union and UN crisis management operations, or for the Syrian National Coalition for Opposition and Revolutionary Forces intended for the protection of civilians”.

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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