Aide humanitaire, protection civile et Medevac. Le plan de l’aide européenne pour l’Ukraine.

(B2, dans la salle de crise de l'Union européenne) La guerre en Ukraine est un évènement exceptionnel, qui demande une réponse exceptionnelle. L’Union européenne et ses États membres s’activent et s’organisent pour livrer de l’aide humanitaire et de protection civile. 

« Ces jours-ci, étonnamment, il faut faire face au dernier désastre causé par l’homme, l'agression de la Russie contre l’Ukraine », relève le commissaire européen Janez Lenarčič jeudi (17 mars), dans la salle de crise de la DG ECHO. « C’est un désastre aux proportions comme on n’en en pas vues depuis la Seconde Guerre mondiale ». Les besoins sont « énormes », juge-t-il, « et ne font que grandir, chaque jour que l’agression continue ».

La plus grande opération de l’ERCC

La salle d’opération du Centre de coordination de la réaction d’urgence de la DG ECHO de Commission européenne (CERU/ERCC) a l’habitude des désastres. Dans cette salle aux grandes cartes interactives, drapeaux européens et chaînes en continu, on localise les catastrophes, prépare des évacuations, et organise les livraisons d’aides. En ce moment, une « crise » monopolise l’attention : l’Ukraine. « La plus grande opération jamais gérée par l'ERCC, et de loin », assure le commissaire européen.

Du carburant, des médicaments et de la nourriture : les 27 réagissent 

Les 27 États membres participent aux livraisons via le mécanisme de protection civile de l’UE, selon les besoins transmis par l’Ukraine. C’est la toute première fois, se réjouit-on à la Commission européenne, l’air presque impressionné. Ensemble, ils envoient autant de nourriture, de médicaments, d'ambulances, de carburant, de matériel de lutte contre l'incendie, des hôpitaux, des trousses de premiers secours, du carburant et du matériel pour les infrastructures énergétiques, détaillent le commissaire et Hans Das, directeur gestion des situations d’urgence et RescEU de la DG ECHO. « Au début, l'accent était mis sur les médicaments, maintenant il s'agit plutôt d’abris », précise ce dernier. Mais uniquement de l’assistance en nature, reçue et dispatchée par le gouvernement ukrainien. Selon les estimations de la Commission européenne, l’assistance représente plus de 100 millions d’euros.

Mobiliser RescEU

La réserve stratégique de la Commission européenne (RescEU) est aussi mobilisée — bien qu'initialement destinée aux seuls États membres — pour fournir « principalement des équipements hospitaliers et médicaux », explique Hans Das.

En Ukraine en moins de deux jours 

« Notre responsabilité est d'apporter de l'aide en Ukraine, soit au point de passage de la frontière, soit dans un hub dans le pays. C’est un exercice difficile, en raison du volume impliqué. Les centres logistiques en Pologne et en Roumanie facilitent les livraisons » détaille Janez Lenarčič. Combien de temps faut-il ? « C’est très rapide. Cela peut prendre quelques heures. Mais tout le processus, de l'établissement de l'offre à la livraison des marchandises en Ukraine, prend un à deux jours, en fonction de la logistique », note Hans Das.

Aide humanitaire : des biens et de l’argent

En plus de l’aide dans le cadre de la protection civile, il y a l’aide humanitaire. L’ERCC n’est pas mobilisée, mais la DG ECHO, oui. La Commission européenne se repose sur ses partenaires humanitaires qui sont sur le terrain, comme les Nations unies et la Croix rouge. « Soit les partenaires se procurent et distribuent les biens (nourriture, médicaments, kits d'hygiène, couvertures, matériel pour bébés). Soit ils donnent de l'argent liquide aux personnes dans le besoin, car les banques ne fonctionnent pas », explique Martin Taschner, chef d’unité Voisinage oriental de la DG ECHO.

En termes de budgets, la Commission européenne a « plus que triplé son allocation précédente pour l’Ukraine », félicite le commissaire : « 93 millions d’euros en aide humanitaire » pour pallier aux conséquences immédiates de la guerre, « dont 85 millions pour l’Ukraine et 8 millions pour la Moldavie ».

… Mais bloquée à l’entrée des villes assiégées

Cependant, l’aide arrive difficilement. « Nous constatons des restrictions d'accès, notamment à l'est et au sud du pays. Les partenaires sont capables de livrer. Pas le volume nécessaire, mais l'aide arrive, par exemple parce que les stocks sont déjà proche », explique Martin Taschner, comptant sur une négociations. « Il y a des médiations pour garantir un voie sûre pour les personnes qui s’échappent des zones de guerre. Mais nous voyons que les accords ne sont pas toujours respectés. Le plus souvent, ils ne le sont pas. Nous sommes inquiets. Et c'est d'abord la responsabilité des forces russes », commente Janez Lenarčič pour B2. Elles « ne respectent pas leurs obligations internationales pour créer un accès sûr aux travailleurs humanitaires », ajoute-t-il.

10.000 lits d’hôpitaux pour les Ukrainiens blessés

Une prochaine aide va être mise en place : Medevac, l’évacuation sanitaire. « L’accent est mis sur les personnes ayant besoin de soins médicaux, les personnes malades avant l'agression. Nombre d'entre elles ont atteint les hôpitaux polonais et, de là, nous allons mettre en place une évacuation sanitaire via Medevac », explique Martin Taschner. De Pologne, les Ukrainiens blessés ou souffrant d’une maladie chronique par exemple pourront être évacués vers des hôpitaux dans le reste de l’Union, où « jusqu'à 10 000 lits leur ont été réservés ».

(Aurélie Pugnet)

Pour aller plus loin sur la salle de crise de l'Union, lire notre reportage dans la salle de crise de la Commission européenne, à l’heure du Coronavirus