Côte d’Ivoire : les Européens font les gros yeux mais n’utilisent pas leurs bras
La Côte d'Ivoire était à l'ordre du jour du COPS, le Comité politique et de Sécurité de l'Union européenne, aujourd'hui. Mais les Européens ne devraient pas franchir le rubicon de la solution de force. On en reste aux décisions proposées par Cathy Ashton, la Haute représentante de l'Union européenne, et avalisées par les ministres des Affaires étrangères le 14 décembre, à savoir : dans un premier temps, interdiction de séjour pour les dirigeants ivoiriens et, dans un deuxième temps, gels des avoirs. Cette décision est intervenue en un temps record. Mais elle montre la limite de cette "gentille" diplomatie sur le terrain qui peut être efficace sur le long terme. Mais est inefficiente sur le court terme.
Les gros yeux des Européens
Les Européens font ainsi les gros yeux à Laurent Gbagbo qui n'en a cure. Lui, sa femme ainsi que 17 autres dirigeants ivoiriens sont interdits de séjour en Europe. Mais le président auto proclamé de Côte d'Ivoire prend ses vacances ailleurs et le fait savoir. Quant au gel des avoirs, il devrait intervenir d'ici plusieurs jours. La décision est "plus complexe" explique-t-on coté européen. Mais d'ici là, le dirigeant ivoirien devrait avoir pris ses précautions. En attendant, le chef de gouvernement a le pouvoir et la libre disposition de la force et est prêt à l'utiliser comme il l'a montré ces derniers jours. L'objectif pour lui n'est pas à moyen terme, mais à très court terme : écraser la rebellion.
Pas d'usage de la force, même pour évacuer les Européens
Or, recourir à la force, l'Union européenne ne le veut pas. Ce n'est pas qu'elle ne peut pas (elle dispose de certaines forces). Mais cette option n'a même pas été évoquée sur la table du COPS. Du coté de Catherine Ashton, on explique que tous les moyens employés sont pacifiques. Et qu'il n'est "pas question et pas justifié" d'utiliser les battlegroups en pareille circonstance. "Ces battlegroups n'ont jamais été utilisés. Et ce serait vraiment contre productif de les utiliser aujourd'hui", explique un de ses proches. Ils ne sont pas nécessaires sur place pour évacuer les Européens. "C'est à chaque Etat membre de prendre ses mesures. Et chaque ambassade a pris ses dispositions et plans d'urgence. La grande majorité des résidents sur place sont Français. Et la France a pris les mesures." Quant à venir renforcer les forces de l'ONU sur place (ONUCI), autant rêver, ce n'est pas du tout l'état d'esprit de Cathy Ashton qui songe plutôt aux fêtes de Noel et de fin d'année pour souffler un peu... (la prochaine réunion du COPS est programmée pour ... le 7 janvier).
En opérant un déni d'existence des battlegroups, le cabinet de Lady Ashton commet une lourde faute. Il ne répond pas à une crise existante, avec tous les moyens de l'UE disponibles. Il laisse les Etats membres et, en particulier, la France se débrouiller avec ses ressortissants. Il réitère l'erreur d'Haiti : l'attentisme face à la crise. Sauf que cela fait désormais un an que l'équipe Ashton est en place. L'excuse du "je n'ai pas de bureau" ne tient plus aujourd'hui. Face à la crise, la voix de la diplomatie européenne est pour l'instant très faible et même plutôt atone. Et cependant, elle est plus que jamais nécessaire. Une intervention européenne aurait plus qu'un avantage. Ne pas laisser la France, ancienne puissance coloniale, dans un face à face délicat avec le pouvoir ivoirien. Montrer aux Africains que l'UE peut agir, avec détermination si nécessaire, et pas uniquement par l'aide humanitaire ou l'aide au développement. Soutenir les forces de l'ONU. Bref tenir son rang international...
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