Les menaces hybrides au coeur de la présidence finlandaise du Conseil
(B2 à Helsinki) La présidence finlandaise du Conseil de l'Union européenne démarre. Le chaos institutionnel qui règne ne doit pas faire oublier la réalité actuelle. Les menaces hybrides font partie du lot quotidien. Les Finlandais invitent les Européens à réagir
Pour le nouveau premier ministre finlandais, Antti Rinne, qui a présenté aux journalistes (dont B2) son programme, quatre grands enjeux rythmeront la présidence finlandaise : l'état de droit, une Union « plus compétitive et socialement inclusive », le changement climatique et... la sécurité intérieure avec la lutte contre les menaces hybrides. C'est ce dernier point qui a attiré notre attention.
Deux mesures phares
La présidence finlandaise souhaite « renforcer la capacité à faire face aux menaces hybrides, tant au niveau de l’UE que dans les États membres. » Ce grâce à deux mesures centrales. D'abord, un « groupe de travail permanent du Conseil sur la résilience et la réponse » à ces menaces sera créé. Ensuite deux séries d'exercices avec les ministres de l'Intérieur et des Finances auront lieu lors des réunions informelles prévues à Helsinki. La première le 18 juillet avec les ministre de l'Intérieur. Les autres auront lieu lors des réunions des 13 et 14 septembre. Ils seront soumis à des exercices basés sur des « menaces fictives » afin de « renforcer la capacité de l'UE à y faire face ». C'est la « première fois » qu'une telle mesure est mise en œuvre, ce type d'exercice ayant auparavant toujours eu lieu avec les ministres de la Défense. NB : Cela avait notamment été le cas en septembre 2017 en Estonie lors d'une informelle défense avec le premier exercice cyber mené au niveau stratégique (lire : A Tallinn, les ministres jouent à la guerre cyber hybride (V2)).
Une expertise nationale particulière
L'intérêt de la Finlande pour les menaces hybrides n'est pas anodin. Pekka Haavisto, le ministre des Affaires étrangères, l'a rappelé : son pays a une certaine « expérience en tant que cible », notamment avec « l'usage de nouvelles technologies pour manipuler les connexions GPS ». La source de cette menace est d'ailleurs identifiée : la Russie. Car si « les grandes puissances mondiales ont leur influence », la Russie est particulièrement « proche » de la Finlande, avec qui elle partage une frontière commune de 1300 km. En conséquence, Helsinki héberge le centre d'excellence sur les menaces hybrides, un cadre de coopération sur cette thématique pour 22 États membres de l'UE (lire : Le centre d’excellence sur les menaces hybrides d’Helsinki. Un think tank pour chercher des réponses).
Un phénomène ancien difficile à cerner...
Le phénomène de menace hybride est « difficile » à définir, conçoit le ministre. Il s'agit « d'activités externes hostiles coordonnées qui ont pour objectif de rester indétectables ». La « difficulté » de trouver l'origine de telles activités fait partie de la « nature de la menace ». Ce phénomène n'est pas « nouveau », il y a « toujours eu l'influence hybride ». Le concept a émergé lors de la première guerre de Tchétchénie contre la Russie avec, entre autres, la « corruption de la police », nous explique une experte.
... En perpétuel renouvellement
Le défi réside aujourd'hui dans les nouvelles technologies qui constituent de « nouveaux moyens » et auxquels il faut trouver de « nouvelles réponses ». Des « moyens hybrides » ont notamment été utilisés durant la crise des réfugiés de 2015. La radicalisation, l'influence sur les élections, la désinformation relèvent également de ce type de menace.
(Hélène Court-Fortunaz, st.)
Une menace pour la démocratie
Les auteurs de menaces hybrides recherchent une « vulnérabilité spécifique d'un État démocratique » et utilisent ensuite « différents types d'interférences [...] dans les affaires souveraines d'un pays », nous explique une des expertes du panel. L'objectif n'est pas « nécessairement de détruire la démocratie », mais de conduire la cible à prendre les « mauvaises décisions », décisions qui « vont à son encontre ». Maria Ohisalo, ministre de l'Intérieur, précise bien qu'il s'agit d'une « menace pour la sécurité intérieure » dont l'objectif est de « saper la confiance dans les autorités publiques ». Ce « mécanisme de l'ombre » est un besoin pour plusieurs « régimes autoritaires », la Russie tout comme la Chine étant citées.
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