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(photo : Emasoh Agenor / EMA)
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[Actualité] L’opération Agenor dans le détroit d’Ormuz tire le rideau

(B2) Sans tambour ni trompettes, l'opération de surveillance dans le détroit d'Ormuz a cessé son activité fin juin.

Lancée en 2020 par la France, sous forme d'une initiative multinationale avec plusieurs pays dont le Danemark et le Benelux, l'opération Agenor visait à assurer la surveillance du détroit d'Ormuz face à la menace iranienne.

Dernier sunset pour l'opération

C'est un simple message sur le réseau social X-Twitter, émis jeudi (27 juin), qui l'annonce : « Aujourd'hui a eu lieu la cérémonie de « sunset » (clôture) de l'opération EMASoH Agenor ». La cérémonie de remise du commandement du contre-amiral belge Gilles Colmant s'est en effet déroulée sans successeur. Elle marque « le début de l'état de vigilance de l'EMASoH », indique simplement le message, plutôt sibyllin.

Le passage de témoin à Aspides

« La contribution à la liberté de navigation jusqu'au canal de Suez se poursuit dans le cadre de l'European Union Naval Force - Operation Aspides », indique peu après l'état-major français des opérations. Mais « la veille continue ». Une veille assurée, selon nos informations, depuis la base française dans les Émirats arabes unis.

Une logique politico-militaire

Cette fermeture pour inopinée qu'elle soit apparait cependant logique. La France avait toujours milité (ainsi que la Belgique) pour une opération européenne allant de la mer Rouge à la mer d'Arabie, faisant face à toutes les menaces, des Houthis au Yémen aux Iraniens dans le détroit d'Ormuz. Un concept qui avait une logique à la fois navale et politique. Mais les Espagnols d'abord, les Allemands ensuite, s'étaient opposés à une telle fusion des opérations (lire : [Exclusif] Opération européenne en mer Rouge. La discussion se corse sur Aspides). En mettant en sommeil Agenor, les Français fusionnent de fait les deux opérations.

Une nécessité opérationnelle

Au niveau opérationnel, l'opération n'avait plus de navires depuis le départ de la frégate belge Louise Marie vers l'opération Aspides. Et aucun pays ne semblait vouloir mettre de nouveaux moyens à disposition. La plupart des pays participant à Agenor de façon concrète (Grèce, Italie, Belgique, Danemark, France, Pays-Bas) préférant les mettre à disposition des deux opérations — l'européenne Aspides et l'américaine Prosperity Guardian — présentes en mer Rouge et dans le détroit de Bab-el-Mandeb, où la menace apparait beaucoup plus cruciale et directe que dans le détroit d'Ormuz.

Une menace iranienne moins urgente que la menace Houthis

L'opération européenne dispose, en effet d'un effectif au-dessous du minimum opérationnel, comme l'a rappelé directement le commandant de l'opération, le Grec Vasileios Gryparis dans B2 (lire : [Entretien] Aspides manque de navires. Pour être efficace, il en faudrait dix). Enfin, sur place, la menace iranienne semble moins prégnante que par le passé. Et l'heure semble à la détente entre Téhéran et les pays occidentaux (les récentes libérations d'otages en attestent).

Au bilan : près de 1500 actions de réassurance

Durant ses quatre ans d'activité, les quelques 47 navires militaires qui se sont succédé au sein de l'opération Agenor Emasoh ont mené 291 accompagnements de navires et effectué au total avec les moyens aériens près de 1500 opérations (1457 très exactement) de « réassurance » auprès de navires marchands. Ils ont assuré en cumulé « 1320 jours en mer ». Tandis que les 21 équipages d'avions de patrouille maritime, qui se sont succédé — essentiellement à bord de l'Atlantique 2 français —, et le drone italien MQ 9 ont effectué en tout « 3300 heures de vol ». Les moyens de surface et aériens ont effectué au total « 1457 actions de réassurance auprès de navires marchands », dont « 300 accompagnements de navires », selon le bilan détaillé par l'opération.

(Nicolas Gros-Verheyde)

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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