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Un des avions dont dispose l'opération Sophia pour rester opérationnelle, le P72A italien (Crédit : EUNAVFOR Med / Sophia)
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L’opération Sophia prolongée pour six mois, toujours sans moyens navals

(B2) L'Union européenne a formellement décidé le 26 septembre, de prolonger pour six mois supplémentaires, jusqu'au 31 mars 2020, l'opération maritime de l'UE en Méditerranée de lutte contre les trafics (EUNAVFOR Med / Sophia). Mais toujours sans disposer de navires en mer

Un des avions dont dispose l'opération Sophia pour rester opérationnelle, le P72A italien (Crédit : EUNAVFOR Med / Sophia)

Cette décision était attendue après l'aval des ambassadeurs du COPS le 12 septembre dernier. Elle a été approuvée en point A (sans discussion) par les ministres chargés de l'Industrie, réunis jeudi (26 septembre), en Conseil 'Compétitivité'.

Sans moyens navals

« Le déploiement des moyens navals de l’opération restera temporairement suspendu » confirme le communiqué du Conseil de l'Union européenne. L'opération continuera donc son fonctionnement, mais de façon limitée, ne disposant que de moyens aériens pour la surveillance des eaux au large de la Libye. Elle se concentre aussi sur la formation des garde-côtes et marins libyens. Les États membres de l'UE « continuent de travailler » pour trouver « une solution relative au débarquement » précise-t-on du côté européen.

Une solution toujours recherchée sur le mécanisme de débarquement

La prolongation de l'opération sans moyens navals avant le 30 septembre s'imposait. Aucune solution n'ayant pu être trouvée dans les derniers six mois à la problématique du débarquement des personnes secourues en Italie et à leur répartition, automatique et rapide, dans les autres États membres. Une demande, devenue exigence, du gouvernement italien, initiée par l'ancien vice-Premier ministre Matteo Salvini (Ligue du Nord), mais partagée peu ou prou par l'ensemble de la classe politique italienne. Le renversement du gouvernement, avec l'arrivée du parti démocrate au pouvoir, aux côtés du Mouvement 5 Étoiles, a changé la donne et l'ambiance. Les initiatives se sont multipliées ces dernières semaines pour trouver une solution (lire : Sauvetages et débarquements : une étape de plus vers un accord). Les officiels européens se sont donnés jusqu'à la fin de l'année pour trouver une solution.

Six mois et non trois mois

À l'origine une des options présentes était de prolonger l'opération pour trois mois seulement (lire notre confidentiel : L’opération Sophia pourrait être reconduite pour quelques mois sans navires). Mais « ce délai a été jugé très court pour trouver une solution et la formaliser » a confié à B2 un diplomate européen. Sans compter la mise en pratique. De plus, avec l'arrivée de l'hiver qui rend les trajets maritimes à bord de petits canots très difficile, diminuant naturellement le nombre de départs de Libye et les arrivées sur les côtes, il n'y avait d'urgence en soi. L'option d'une prolongation de six mois a donc été choisie, évitant ainsi de revenir sur le sujet avant la fin de l'année. Mais, si une solution est trouvée, « il sera possible, à tout moment, de revenir à une présence navale » poursuit notre interlocuteur. Il suffit que les ambassadeurs du COPS (Comité politique et de sécurité) en décident ainsi. Le mandat, en lui-même n'étant pas modifié, la décision peut être « prise rapidement », dès qu'une solution politique est trouvée.

Des moyens en alerte

Du côté de l'opération, on assure avoir les moyens de remettre rapidement des navires en action. « Nous avons demandé aux États membres de garder des navires dans un délai de 14 jours afin de permettre une éventuelle réponse maritime si cela est nécessaire et que le COPS en décide ainsi » confirme un officier de l'opération. Selon nos informations, deux ou trois navires pourraient ainsi reprendre la mer dans ce délai. Mais les pays contributeurs sur le plan maritime se comptent sur les doigts d'une seule main. Et il semble d'ores-et-déjà certain, selon notre propre analyse, que ce sera l'Italie, voire l'Espagne, qui pourraient fournir dans un délai aussi court des moyens navals. Il y a un certain manque d'appétence des États membres. La dernière conférence de génération le 30 avril dernier à Bruxelles n'a pas été couronnée de succès. « L'augmentation des moyens de reconnaissance et surveillance (ISR) n'a pu être complètement remplie » reconnait laconiquement un des responsables militaires de l'opération. Un seul moyen supplémentaire, « un avion de patrouille maritime avec 50 heures de vol par mois, a pu être mis à disposition de l'opération ».

(Nicolas Gros-Verheyde)

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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