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EUFOR RCA : un bien timide feu vert. L’état des forces (maj2)

BadgeEUFOR Rca 2014-02-27 17.28.04(BRUXELLES2 - exclusif) La réunion de la conférence de génération de forces pour l'opération EUFOR RCA vient de se terminer à Bruxelles, vendredi soir. Et personne ne s'est empressé de claironner le résultat sur les toits. Car réunir la centaine d'hommes nécessaire a été particulièrement laborieux. Et il reste encore une ou deux inconnues, qui doivent être encore clarifiées cette semaine.

Transport stratégique, génie et soutien médical

Après s'être faits un peu tirer l'oreille, deux pays (l'Italie et l'Allemagne) ont annoncé mettre à disposition des moyens supplémentaires. Berlin mettra à disposition des heures de transport stratégique, notamment via les avions Antonov An‑124 russo-ukrainiens du contrat Salis (OTAN). Ce qui a un avantage essentiel : un engagement politique limité, un engagement militaire nul sans nécessiter d'autorisation parlementaire. L'Italie devrait fournir des éléments de génie d'aide au déploiement — destinés à préparer le terrain du camp sur l'aéroport —.

Ajoutons que la Suède doit aussi fournir du transport stratégique (sous la forme d'heures de transport), en particulier pour les militaires d'Estonie et de Lettonie (qui fournissent chacun 1 section de combat). Et le Royaume-Uni devrait aussi fournir du transport, à titre bilatéral, pour aider la compagnie Géorgienne. Tandis que le Portugal fournira des éléments de gendarmerie ainsi qu'un avion de transport tactique (type C-130) disponible sur le terrain.

La France assurera le complément restant, notamment le soutien médical (Rôle 1), destiné à compléter le Rôle 2 - déjà assuré par les éléments français de l'opération Sangaris. Une possibilité avait été entrevue, un moment donné, avec le Montenegro ; mais cet Etat des Balkans n'a pas donné suite malgré la lettre officielle d'invitation.

Le dilemme belge

Après une réunion du Kern - le conseil restreint - difficile, la Belgique prévoyait de mettre à disposition une équipe chargée du "handling" (chargement/déchargement des avions) d'environ 20 militaires ainsi que, de façon plus hypothétique, une équipe de protection d'environ 40-50 personnes. Le financement de ces militaires n'est pas "calé". Pour la première équipe, il sera assuré par le budget général (1,5 millions d'euros) ; le ministère de la Défense ne souhaitant pas prendre en charge seule cette dépense. La question devra faire de discussions la semaine prochaine, au sein du gouvernement ; discussion compliquée par le début de la campagne électorale (les élections générales et régionales sont prévues le 25 mai), certains membres du gouvernement se demandant pourquoi le budget contribuerait aux actions militaires et pas à d'autres priorités. Pour la seconde équipe, c'est encore un peu plus problématique car l'accord obtenu au sein du Kern est de faire porter le coût  (4,5 millions d'euros) sur le budget européen. Finalement, apparemment, la force européenne pourrait se passer de cette proposition belge, devant la complexité politico-financière qui en découle.

Lancement la semaine prochaine

Ces différents éléments permettent de boucler, à peu près, les effectifs nécessaires pour déclarer la capacité opérationnelle initiale (IOC) et au général Ponties de rédiger à l'intention de la Haute représentante la lettre nécessaire aux "28" ambassadeurs de l'UE de décider le lancement de l'opération. Ce qui pourrait être fait lors d'une réunion mardi prochain. Mais de nouvelles conférences de génération de forces devront être organisées pour la suite de l'opération. Il manque, en effet, toujours une compagnie d'infanterie (sur les 4 prévues, il n'y en a que trois qui sont réunies). Rappelons que le président français, François Hollande, organise à Bruxelles un mini-sommet consacré à la Centrafrique, à l'occasion du sommet UE-Afrique, mercredi 2 avril. Réunion à laquelle devra participer le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian.

Au total, une petite dizaine d'Etats devraient envoyer des troupes sur place : France, Géorgie, Espagne, Portugal, Pologne, Estonie, Lettonie, Belgique, Finlande, Hongrie - avec un soutien logistique de l'Allemagne, de la Suède et du Royaume-Uni. Le total de pays participants à l'opération est supérieur car une bonne partie d'Etats européens ont préféré participer à EUFOR en envoyant simplement quelques hommes (officiers ou sous-officier) au quartier-général européen (d'opération) ; la Grèce fournissant une partie de l'effectif de soutien de l'OHQ de Larissa. A noter que la Roumanie, qui avait fait une proposition de force, a retiré celle-ci du fait essentiellement de la situation instable en Ukraine. Quant à la Hongrie, sa proposition a été jugée finalement non nécessaire ou pas suffisante. « Cela fait partie des ajustements de force entre ce qui est proposé et ce dont nous avons besoin » explique un officier au fait du dossier.

(mis à jour) 30 et 2 avril (précisions sur Italie, Roumanie, Portugal, Hongrie)

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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