Etat de droit en Pologne. La Commission se décide à entamer une procédure
(B2) La Commission européenne a décidé, ce lundi (2 juillet), d'entamer une procédure d'infraction « d'urgence » en envoyant une lettre de mise en demeure à la Pologne concernant la loi polonaise sur la Cour suprême.
Même s'il utilise la terminologie de 'procédure d'urgence', l'exécutif européen aura finalement attendu le dernier moment pour lancer une procédure contre la Pologne pour manquement à l'état de droit. La loi polonaise sur la Cour suprême entre en effet en vigueur mardi (3 juillet). La mise en demeure n'est que la première étape de la procédure, qui pourrait être au besoin accélérée.
Une atteinte au principe de l'indépendance judiciaire
La Commission considère que la loi polonaise porte « atteinte au principe de l'indépendance judiciaire, y compris l'inamovibilité des juges, et que la Pologne ne respecte pas les obligations qui lui incombent en vertu de l'article 19, § 1, du traité sur l'Union européenne à lire en connexion avec l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ».
Un délai d'un mois pour répondre
Le gouvernement polonais dispose d'un mois pour répondre à la lettre de mise en demeure de la Commission. Celle-ci peut ensuite décider, sans délai fixe, d'émettre un avis motivé, étape préalable avant la saisine de la Cour de justice de l'UE.
Ce que reproche la Commission
L'abaissement de l'âge de la retraite des juges de la Cour suprême de 70 à 65 ans va entraîner la mise à la retraite de un tiers des effectifs de la Cour (27 des 72 juges qui composent ce tribunal), ainsi que du premier président de la Cour suprême (dont le mandat de six ans va être résilié prématurément). La seule possibilité de dérogation — accordée par le Président de la République — ne repose sur aucun « critère préétabli » et il n'existe pas de recours judiciaire contre une décision de refus.
Une question traitée dans le cadre du dialogue de l'état de droit
Cette question n'a « pas été traitée de manière satisfaisante » dans le cadre d'un dialogue sur l'état de droit entre la Commission et les autorités polonaises, entamé au titre de l'article 7 du Traité. La proposition d'introduire une consultation du Conseil national de la magistrature « ne constitue pas une garantie efficace, comme le soutiennent les autorités polonaises ». L'avis du Conseil n'est, en effet, « pas contraignant et repose sur des critères vagues ». De plus, à la suite de la réforme du 8 décembre 2017, le Conseil est désormais « composé de juges membres nommés par le Parlement polonais. Ce qui n'est pas conforme aux normes européennes en matière d'indépendance judiciaire ».
Une menace systémique sur l'état de droit
Dans le même temps, la Commission s'affirme « prête à poursuivre le dialogue en cours » sur l'état de droit avec la Pologne, qui reste « le canal privilégié » de discussion face à ce qui est dénommé par l'exécutif européen comme « une menace systémique » à l'état de droit en Pologne.
(NGV)
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